Crue glaciaire au Pérou : activation du service CIEST² à Huaraz

Le 28 avril 2025, une crue brutale survenue sur le flanc gauche du glacier Vallunaraju (à environ 5 000 mètres d’altitude), qui alimente le torrent s’écoulant vers la vallée de Llaca jusqu’à la ville de Huaraz, au Pérou. Cet événement a provoqué la mort d’au moins 2 personnes et causé d’importants dégâts matériels. À l’origine de cette crue : une avalanche rocheuse s’est abattue directement sur deux lacs pro-glaciaires, provoquant son débordement.

Figure 1. Comparaison entre 2 ortho-images Pléiades à neuf ans d’intervalle (2016-01-02 et 2025-05-07) montrant l’écoulement qui a généré le GLOF, la disparition du lac (cercle rouge) et les impacts sur la vallée de Llaca (cercle jaune).

L’activation du service CIEST² à la suite de cet événement a permis l’acquisition d’images stéréo Pléiades le 7 mai 2025 sur la zone affectée, ainsi que la production de modèles numériques de surface (MNS) et d’orthoimages à haute résolution. Grâce au dispositif DINAMIS, des images Pléiades antérieures à l’inondation, notamment du 2 janvier 2016, ont pu être exploitées afin de générer des modèles 3D détaillés de l’état initial du site. L’objectif de cette activation était de mieux comprendre les origines du phénomène, de le caractériser et de quantifier ses impacts.

Figure 2. Impacts de la lave torrentielle environ 10 km plus bas dans la vallée de Llaca.

Sur cet intervalle de neuf ans, la perte de masse glaciaire est clairement identifiable, accompagnée de profonds changements morphologiques. On distingue notamment la trace d’au moins trois écroulements rocheux en amont de petits lacs, ainsi que leurs dépôts, qui ont en partie comblé le lac pro-glaciaire. En aval, on observe une érosion marquée des berges du torrent dans les zones de forte pente, ainsi que des plages de dépôts dans les zones plus planes. Cette dynamique est perceptible jusqu’à 10 km en aval (Figure 2), dans des secteurs urbanisés en périphérie de Huaraz, où l’on constate par ailleurs une expansion urbaine notable entre 2016 et 2025.

Figure 3. Carte des changements d’altitude entre le DEM pléiades de 2016-01-02 (avant effondrement) et le DEM pléiades de 2025-05-07 (après effondrement). Les limites du glacier proviennent de INAIGEM, 2020 : https://hdl.handle.net/20.500.12748/499

La chronologie de cet événement en cascade semble impliquer plusieurs écroulements rocheux sur une pente très raide (plus de 55°), composée principalement de sédiments instables. Au moins un de ces écroulements s’est déversé dans un petit lac pro-glaciaire peu profond, d’une superficie de 2 000 m², provoquant son débordement. Le volume de roche mobilisé a été estimé à environ 300 000 m³ (Figure 3). Bien que modestes en comparaison avec d’autres événements catastrophiques liés aux crues de lac en haute montagne, ces volumes soulignent la complexité de la surveillance de ces risques : le nombre de sites potentiellement dangereux très important rend un suivi quotidien extrêmement difficile.

Figure 4. Carte des changements d’altitude entre le DEM pléiades de 2016-01-02 (avant effondrement), le DEM pléiades de 2025-05-07 (après effondrement), et des impacts majeurs en terme de déposition et érosion lors de l’éventement GLOF.

Cette crue soudaine, particulièrement érosive (Figure 4), a provoqué une catastrophe dans des zones où la vulnérabilité est exacerbée par l’urbanisation croissante. Ce secteur de la Cordillère Blanche est historiquement surveillé, notamment depuis la crue de 1941 dans la même vallée, qui avait causé la mort de près de 1 800 personnes. Ces événements sont fréquemment liés aux débordements de lacs glaciaires ou pro-glaciaires, dont la fréquence augmente avec le recul accéléré des glaciers, lui-même étroitement lié au réchauffement climatique actuel.

Pour plus d’informations, contactez Diego CUSICANQUI et Pascal Lacroix.

Plus d'actualités

Activation du service CIEST² pour l’inondation du Sikkim (Inde) en octobre 2023

L’activation du service CIEST² dans le cadre de l’inondation du Sikkim (Inde) le 10/2023 a joué un rôle central dans la compréhension et la modélisation de cet événement.

Glissement de terrain au Groënland : retour sur l’activation du service CIEST2

Le service CIEST2 a été activé pour l’étude d’un écroulement massif dans la région orientale du Groënland qui a engendré des oscillations sismiques détectées à l’échelle mondiale pendant neuf jours.

Estimation du volume de glace détaché lors de l’effondrement du glacier au Kirghizistan à l’aide d’images Pléiades

Le 10 juillet 2022, une semaine après l’effondrement du glacier Marmolada en Italie, un glacier au Kirghizistan s’effondre également sans laisser de victimes. Le 11 juillet, le dispositif d’urgence CIEST² de ForM@Ter a été activé.

Rechercher